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Obligation : Zéro émissions pour les compagnies aériennes : Va-t-il falloir compenser ?

Dernière mise à jour : 18 nov. 2021


Ce 5 octobre dernier, l’IATA (Association internationale du transport aérien) a officialisé l’engagement de plus de 290 compagnies aériennes internationales à atteindre les zéro émissions nettes d’ici 2050 grâce à différents procédés. Cette démarche s’aligne sur les engagements de neutralité carbone pris par la France. C’est donc le premier secteur soumis à cette obligation (après les acteurs du marché des quotas européens). Comment va donc s’articuler cette obligation pour les compagnies aériennes? Surtout, comment doivent-elles compenser?



Depuis quelques jours, les déclarations de l’IATA lors de l’assemblée générale de Boston étaient attendues avec impatience par les acteurs de l’aéronautique et les ONG de défense de l’environnement. En 2009, elle avait déjà préconisé une réduction des émissions de 50% d’ici 2050. Engagement visiblement insuffisant à ses yeux puisqu’elle planifie maintenant un objectif de zéro émission nette pour 2050.


Un pari aventureux pour les compagnies aériennes:

Nul besoin de rappeler le lourd impact du trafic aérien sur le dérèglement climatique, sans oublier que cette pollution risque de s’accroître dans les années à venir si aucune mesure n’est prise en compte. En effet, le nombre de voyages, au nombre de 4,5 milliards en 2019 risque de doubler à l’horizon 2050. Willie Walsh, Directeur général de l’IATA a donc mis en avant les problématiques d’urgence climatique.


Au-delà de cette déclaration, les actes doivent suivre. Ceux-ci seront scrutés par les ONG et autres défenseurs de l’environnement. Malheureusement, un léger hic subsiste : les alternatives technologiques proposées pour atteindre ces objectifs sont peu nombreuses et n’annoncent pas de belles perspectives. Dans tous les cas, il sera impossible pour les compagnies aériennes de parvenir à leurs fins sans la compensation carbone.


Fini la plantation d’arbres à l’autre bout du monde !

Comme on avait l’habitude de le voir, certaines compagnies (dont nos joyaux européens) utilisaient la compensation carbone à leur façon, frôlant le Greenwashing. C’est d’ailleurs pour cela que le dispositif de compensation carbone a été longtemps décrié. Le problème ? Les entreprises se disaient neutres en carbone, ce qui par définition n’est pas possible, et allaient financer des projets qui, certes, stockent du carbone, mais dans des pays à l’autre bout du monde. Le reproche qui leur avait été fait n’était pas d’aider au développement de ces pays mais bien d’acheter des crédits carbone à des prix très très bas et d’en profiter à des fins marketing ! De quoi s’offrir une image engagée et verte sans avoir à balayer devant sa porte. C’est d’ailleurs ce qui permettait à des entreprises telles que British Airways voire Ryanair de proposer des vols « neutre en carbone » en payant une poignée d’euros (entre 2 et 6) supplémentaires.


Même si rien ne stipule que les compagnies devront compenser de manière propre et pérenne, il y a fort à parier que celles-ci retiennent la leçon, afin d’éviter le même bad buzz médiatique auquel Air France avait dû faire face l’année dernière avec ses « vols neutres en CO2 ».


Mais alors, bien compenser ses émissions de GES, c’est possible?

Contrairement au bon et au mauvais chasseur, on peut faire la différence entre une bonne et une mauvaise compensation. Certes, la compensation ne permet pas de réduire directement ses émissions et peut inciter certaines entreprises à se déresponsabiliser de leur empreinte carbone. Néanmoins, elle peut se montrer vertueuse lorsque le financeur décide de compenser localement (près de sa zone d’activité) et plus particulièrement en France. La tonne équivalent carbone y est plus chère (environ 40 euros) mais les projets français sont créateurs d’emplois, ils aident au développement économique de la région, permettent la préservation de l’environnement, embellissent les paysages, et peuvent même aider à compenser dans sa propre chaîne de valeur. Enfin, point notable : en compensant en France, on participe à la neutralité carbone nationale à l’horizon 2050, qui elle est possible.


Bien compenser c’est aussi compenser après l’évitement et la réduction de ses émissions à la source (méthode ERC). Il faut que seules les émissions restantes, dites résiduelles, soient contrebalancées, et pas l’intégralité de ses émissions, ce qui reviendrait à réellement se déresponsabiliser de son empreinte.


Enfin, les projets financés doivent avoir un impact positif vérifié sur l’environnement. C’est dans cette optique qu’est né le Label bas-carbone (LBC). Pour en savoir plus : Où en est le label bas-carbone ? En quelques mots, le Label bas-carbone certifie des réductions d’émissions issues de projets français qui respectent un certain nombre de critères. Les entreprises peuvent donc racheter ces crédits carbone en finançant volontairement le projet.


Planter des arbres, pourquoi pas, mais pas que !

Dans l’imaginaire collectif, la compensation carbone revient à planter des arbres. Depuis quelques mois, il est possible de compenser dans divers secteurs autres que le boisement ou le reboisement.


Quels sont ces nouveaux secteurs de compensation ? Chaque jour, le Ministère de la Transition écologique évalue des méthodes qu’il pourra valider et ainsi permettre l’essor de projets plus diversifiés. On retrouve le secteur du bâtiment (Réemploi de produits), de l’agriculture (Gestion des intrants, Ecométhane, développement de haies…), du transport, des grandes cultures ou encore des villes. Le Ministère offre donc la possibilité de compenser dans d’autres domaines. La plantation d’arbres reste pour le moment majoritaire en nombre de projets labellisés et peut présenter de nombreux avantages. Il faut tout de même ne pas oublier que l’arbre prend du temps à croître et que les émissions seront donc compensées le du long terme.


La possibilité d'aller au-delà de sa propre empreinte :

Si les compagnies aériennes souhaitent s’engager dans la compensation carbone, elles peuvent aussi financer des projets qui vont stocker plus de carbone que ce qu’elles doivent compenser, on parle de contribution carbone. Elles ont donc le choix d’aller au-delà de leurs obligations en participant activement à l’atteinte de la neutralité carbone française. Du zèle qui ne serait pas de trop pour la santé de notre planète. Il est d’ailleurs largement possible pour ces compagnies aériennes de compenser davantage que leurs propres émissions. Voilà un engagement qui peut peser dans la balance de la lutte contre le réchauffement climatique.


Bien que celles-ci se retrouvent en difficulté depuis quelques années, certaines d’entre elles ont reçu des aides étatiques dans le cadre du plan de relance. Ces fonds ont pu être utilisés dans l’engagement en faveur de la transition environnementale. C’est le cas de notre leader national Air France, qui a bénéficié d’une aide de 7 milliards sous forme de prêt, mais avec une contrepartie : devenir l'une des compagnies aériennes les plus écologiques du monde. Ces aides peuvent aussi marquer un tournant dans cette transition. Seul bémol : de nombreuses ONG s’indignent du manque d’obligations imposées aux compagnies aériennes.


Quel est l'engagement de l'IATA vis-à-vis de la compensation carbone?

Sans réellement stipuler quelles méthodes seront appliquées, l’IATA souhaite utiliser la captation carbone à hauteur de 19% des réductions d’émissions des compagnies aériennes. Ce chiffre pourra varier au fil des années, en fonction de l’avancée des autres alternatives à la décarbonation (biocarburants, hydrogène…).


D’autant plus que le marché du “carbon offset” tend à s’imposer dans le monde. Depuis les années 2000, le nombre de tonnes carbone compensées a explosé, passant de 40 millions de tonnes en 2010 à plus de 250 en 2020, et ce seulement pour les 5 plus gros acteurs du marché. Tout porte donc à croire que l’offsetting marquera les prochaines décennies. Encore faut-il proposer de réels changements de pratiques avant d’envisager la compensation carbone. Cela reste tout de même un dispositif qui se popularise chez les PME comme chez les mastodontes des marchés. Nombreuses sont les entreprises et collectivités qui souhaitent s’engager par elles-mêmes dans des démarches durables. Les compagnies vont devoir compenser, certes, mais si possible de la meilleure manière qui soit.


Une obligation de compenser pour tous les acteurs français ?

Nous commençons à nous répéter chez Carbonapp! Depuis quelques années, nous remarquons que les pouvoirs publics mettent en place des réglementations en faveur de la transition écologique. Le gouvernement n’a d’autres choix que d’obliger les entreprises et collectivités à agir en ce sens. Ces obligations vont concerner de plus en plus d’acteurs avec toujours plus de restrictions. Un changement drastique des pratiques seulement par bonne volonté s’étant avéré trop long compte tenu du degré d’urgence, il est fort probable que les contraintes en termes de réduction à la source et de compensation carbone deviennent de plus en plus fortes.


Les nouvelles règles imposées aux compagnies aériennes sont donc le symbole de cette augmentation des obligations environnementales pour les entreprises françaises. Aujourd’hui, c’est le secteur aérien qui est concerné. Tout porte à croire que demain, ces obligations s'étendront aux autres secteurs polluants. Si le gouvernement veut permettre l’atteinte de la neutralité carbone française à l’horizon 2050, il va devoir intégrer toutes les entreprises françaises à cette transition. Or, on l’a vu, nombreuses d’entre elles rechignent à participer à ces changements, en utilisant la politique du “minimum syndical”. On s’attend donc à voir davantage de régulations sur les marchés nationaux.


Pourquoi compenser ses émissions dès maintenant?

Le point le plus important pour les entreprises réside dans l’avance qu’elles peuvent prendre par rapport à cette tendance et à leurs concurrents. En effet, changer dès aujourd’hui ses pratiques en instaurant une compensation carbone propre, française et additionnelle est une action qu’il ne vaut mieux pas repousser au lendemain. Une multitude de projets français bas-carbone et certifiés LBC sont à la recherche de financements. Reste à voir si les compagnies aériennes se contenteront du strict minimum ou si elles s'investiront pleinement dans leurs obligations, quitte à aller au-delà de leur propre empreinte carbone. Promesse réelle ou simple fantasme? Dans tous les cas, elles ont aujourd’hui à disposition des outils fiables et durables, qui peuvent les aider à entreprendre leur transition climatique de la meilleure des manières.


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