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Bilan carbone des entreprises en 2023 : un point sur la situation

Updated: Jul 3, 2023

Nouvelle direction sur le reporting des entreprises, élargissement du BEGES au scope 3... La chasse au carbone est lancée et les entreprises sont aujourd’hui sous une pression grandissante de transparence auprès de leurs consommateurs et investisseurs. Des mesures bienvenues avec la sortie récente du 6ème rapport du GIEC qui souligne le retard des actions nationales et internationales dans la baisse des émissions de gaz à effet de serre (GES).


Mais où en est la règlementation bilan carbone dans tout cela et à quels changements les entreprises seront-elles astreintes pour 2023 ? Carbonapp vous explique tout.



QU'EST-CE QU'UN BILAN CARBONE ?


Le bilan d’émissions de gaz à effet de serre (BEGES), comme son nom l’indique, est une évaluation des émissions d’une organisation sur une année d’activité, réparties par postes d’émissions directes et indirectes aussi appelés scopes. Il s’agit d’un document servant à la fois de bilan et de diagnostic environnemental ayant pour but d’identifier les leviers de réduction.

Les scopes jouent un rôle essentiel dans la réalisation d’un bilan GES puisqu’ils permettent de catégoriser les émissions d’une entreprise et ainsi faciliter leur calcul et leur analyse. Il existe actuellement 3 scopes utilisés à travers le monde :

  • Le scope 1, englobant les émissions directes de gaz à effet de serre. Par exemple, si la fabrication d'un produit a nécessité l'utilisation d’un autre combustible ou, plus globalement, si elle a engendré des émissions de carbone.

  • Le scope 2, englobant les émissions indirectes liées à l’énergie. Ces émissions sont générées en dehors du périmètre de l’entreprise – d’où leur caractère indirect – et concernent uniquement la production d'énergie (par exemple, l'électricité consommée pour alimenter les locaux de l'entreprise).

  • Le scope 3, englobant le reste des émissions indirectes liées à l’organisation. Elles peuvent représenter les émissions générées par ses fournisseurs, le transport de ses salariés, la fin de vie de ses produits etc.


Rendue obligatoire pour la première fois à certaines organisations par la loi Grenelle II de 2010, cette réglementation a depuis beaucoup évolué. Aujourd’hui à qui s’applique-t-elle ?



BILAN GES : QUI EST CONCERNÉ ?


En France, l’article 173 de la loi transition énergétique pour la croissance verte impose aux entreprises d’inclure dans leur rapport de gestion annuel les émissions carbones générées par leur activité.

En droit, toutes les entreprises ne sont pas automatiquement concernées par le bilan GES obligatoire, aussi appelé bilan GES règlementaire. L’article L.229-25 du code de l’environnement précise que fournir une bilan GES constitue une véritable obligation légale uniquement pour les acteurs possédant l’une des caractéristiques suivantes :

  • En métropole, les entreprises privées de plus de 500 salariés ;

  • Dans les départements d’outre-mer, les entreprises privées de plus de 250 salariés ;

  • Les services de l’État ;

  • Les structures de droit public de plus de 250 personnes ;

  • L'ensemble des collectivités territoriales de plus de 50 000 habitants.

Oui, vous ne vous trompez pas, même l’État se trouve aussi dans l'obligation de procéder au calcul de ses émissions de gaz à effet de serre. Ce bilan doit être renouvelé tous les 4 ans pour les entreprises, tous les 3 ans pour les collectivités.


Cependant un manque d’implication des organisations, une pression croissance de réduction des émissions GES et de prise de conscience sur le poids du scope 3 ont nécessité la mise à jour de la réglementation Bilan Carbone.



CE QUI VA CHANGER EN 2023


Avec une mise en application le 1er janvier 2023, le décret du 1er juillet 2022 est venu modifier la partie réglementaire du code de l’environnement et apporter des modifications profondes à son champ d’application.


Élargissement du périmètre des émissions : les émissions du scope 3 doivent désormais être intégrées


Jusqu’en 2022, le bilan d’émissions GES (gaz à effet de serre) obligatoire concernait les scopes 1 et 2, laissant le scope 3 comme facultatif et bien souvent laissé à l’écart. Une omission coûteuse environnementalement, et donnant aux organisation le droit de peindre une image bien loin de la vérité quand on sait que ce scope représente souvent la majorité de leur empreinte environnementale.


Avec le décret BEGES, depuis le 1er janvier 2023, le bilan d’émissions devra désormais inclure les émissions indirectes significatives (scope 3) pour les entreprises assujetties à la déclaration de performance extra-financière (DPEF). Autrement dit :

  • Les sociétés cotées (de plus de 500 salariés dont le bilan est supérieur à 20 M euros ou le CA est supérieur à 40 M d’euros)

  • Les sociétés non-cotées (de plus de 500 salariés dont le bilan ou le CA est supérieur à 100 M d’euros)

Pour les autres entreprises non concernées par ces critères mais toujours assignées au BEGES, leur bilan d’émissions pourra se limiter au scope 2. Cette obligation au scope 3 s’appliquera également aux organisation citées précédemment, avec pour rappel :

  • Les entreprises de plus de 250 salariés dans les territoires d'outre-mer ;

  • Les régions, les départements et les EPCI de plus de 50 000 habitants ;

  • Les services de l’État ;

  • Les autres personnes morales de droit public employant plus de 250 personnes.

Là où la DPEF connaît aujourd’hui une formalisation de son rendu via l’application de la nouvelle CSRD, le BEGES ne connaît pas encore de format imposé, bien que le format GHG Protocol reste majoritaire. Ce bilan restera à renouveler à la même fréquence (4 ans pour les entreprises, 3 ans pour les collectivités) et être désormais publié sur le site de l’ADEME.


Évolution de la nomenclature


Pour gagner en précision et couvrir un plus grand périmètre d’émissions, la nomenclature du périmètre opérationnel est désormais classée en 6 catégories avec 4 sections pour le scope 3 :

  1. Les émissions directes (équivalent scope 1)

  2. Les émissions indirectes associées à l’énergie (équivalent scope 2)

  3. Les émissions indirectes associées au transport (équivalent scope 3)

  4. Les émissions indirectes associées aux produits achetés (équivalent scope 3)

  5. Les émissions indirectes associées aux produits vendus (équivalent scope 3)

  6. Les autres émissions indirectes (équivalent scope 3)


Accompagnement du bilan par un plan de transition pour réduire les émissions de GES


Depuis la signature du décret, le bilan d’émissions GES doit désormais s’accompagner d’un “plan de transition” venant remplacer la “synthèse de plans d’action”. Celui-ci contraindra les organisations à préciser les moyens, actions et objectifs qu’elles envisagent de mettre en place.


Les entreprises doivent présenter des objectifs quantitatifs sur deux échéances :

  • le moyen terme, c’est-à-dire la période de leur prochain bilan,

  • le long terme, c’est-à-dire par exemple aux horizons 2030 et 2050 en cohérence avec les point d’étapes de la Stratégie Nationale Bas Carbone (SNBC).

Il est recommandé de positionner ces objectifs en cohérence avec les objectifs de la SNBC et des budgets carbones pour 2030 et pour 2050 :

  • Réduire de 40 % les émissions de GES entre 1990 et 2030,

  • Diviser par 6 les émissions de GES entre 1990 et 2050.


Les risques de sanction en cas de non-respect


Malgré son caractère obligatoire, une majorité des entreprises a jusqu’ici refusé de se soumettre au BEGES avec 65% de bilans manquants en 2017 et 60% en 2018. Face à ces manquements et récidives récurrentes, les sanctions ont dû être revues à la hausse. Là où les organisations risquaient jusqu’à maintenant 1500€ en cas de non-respect, depuis janvier 2023 cette sanction pourra maintenant atteindre les 10 000€, voir les 20 000€ en cas de récidive.


L’objet de ce bilan n’est pas seulement d’être coercitif, mais aussi de permettre aux entreprises de prendre une part active à la transition énergétique – le coup d’un bilan GES étant bien moindre que le montant de l’amende –, d’où la demande du plan de transition expliqué précédemment. Et si réaliser un bilan GES devient une obligation pour un nombre croissant d’organisations, sa création peut mener à bon nombre d’externalités positives.



RÉALISER SON BEGES, PLUS QU'UNE CONTRAINTE


Face à un réchauffement climatique qui empire et ses conséquences de plus en plus marquées, les consommateurs développent de nouvelles attentes vis à vis des entreprises : une responsabilité environnementale. Aujourd’hui le prix et la qualité ne suffisent plus, qu’une organisation face sa part et s’engage dans la réduction de ses émissions contribue à son image de marque.


Par ailleurs, informer en toute transparence et avec clarté sur ses émissions de GES et les démarches de réductions mises en place permet d’orienter le choix des consommateurs et autres parties prenantes en fonction de leurs valeurs, en particulier chez les jeunes.


Réaliser son bilan GES permet donc de satisfaire les attentes de nombreuses parties prenantes, engager ses salariés dans la réduction de leurs émissions, être en conformité avec les nouvelles normes en vigueur... Et enfin de dépenser moins. Car au-delà d’être une coûteuse corvée, réaliser son bilan carbone est avant tout un investissement permettant d’identifier les postes de dépenses les plus énergivores, et pas toujours les plus essentiels.


En somme, bien que les bilans carbones ne soient pas encore obligatoires pour tous, ils sont fortement recommandés. Pour qu’une organisation puisse s’engager dans une démarche de transition écologique cela nécessite des actions concrètes à fort impact. Mais il est impossible de réduire ses émissions carbone tant qu’on ne les a pas quantifiées au préalable.


Par ailleurs, il est très probable que la réglementation évolue de nouveau d’ici 2025 et définisse les nouveaux seuils des entités assujettis à la CSRD approuvée en novembre 2022 et expliquée par Carbonapp dans un précédent article. Par ces changements le bilan carbone deviendra obligatoire pour toutes les entreprises de plus de 250 salariés.


Alors n’attendez pas pour vous lancer !



Article rédigé par Axelle Rimpot

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